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Définitions de la pauvreté

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[8 février 2016]

 Approches de la notion de pauvreté relative

Le terme de pauvreté est employé quotidiennement sans que sa définition ne fasse pour autant consensus. La difficulté à trouver une définition satisfaisante réside dans le fait que le concept de pauvreté est spécifique à une époque et à une société données.

La pauvreté est "l’état, la condition d’une personne qui manque de ressources, de moyens matériels pour mener une vie décente" (Trésor de la langue française).

Selon le Conseil européen de décembre 1984, sont considérées comme pauvres "les personnes dont les ressources (matérielles, culturelles et sociales) sont si faibles qu’elles sont exclues des modes de vie minimaux acceptables dans la société [1]" .

La définition d’ATD Quart Monde tente de traduire le vécu des personnes. L’association s’est donnée comme objectif de comprendre et faire connaître le point de vue des personnes et des populations en situation de grande pauvreté sur les réalités qu’elles vivent. Il s’agit avant tout de décrire ce que les personnes concernées vivent et ressentent, ainsi que les explications qu’elles-mêmes avancent.

De cette recherche associant les plus pauvres est née la définition qu’a proposée Joseph Wresinski au Conseil économique et social, en février 1987 : "La précarité est l’absence d’une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut être plus ou moins grave et définitive. Elle conduit le plus souvent à la grande pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence, qu’elle tend à se prolonger dans le temps et devient persistante, qu’elle compromet gravement les chances de reconquérir ses droits et de réassumer ses responsabilités par soi-même dans un avenir prévisible [2]."

Si la pauvreté ne saurait être une notion universelle, elle présente néanmoins des aspects objectifs.

 Définitions de la pauvreté monétaire

Les États membres de l’Union européenne ont adopté une autre méthode de calcul, fondée sur des critères relatifs. Ils se sont mis d’accord sur un ensemble d’indicateurs, dits de Laeken (2001). Le seuil de pauvreté est déterminé par rapport à la distribution des niveaux de vie de l’ensemble de la population. Ainsi, le seuil de pauvreté européen est à présent fixé en-dessous de 60 % du revenu médian.

En France, selon l’Institut national de la statistique et des études économique (Insee) : "Un individu (ou un ménage) est considéré comme pauvre lorsqu’il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté." La France utilise le seuil de 60 % du revenu médian, mais elle publie aussi des taux de pauvreté selon d’autres seuils (40 %, 50 % ou 70 %), conformément aux recommandations du rapport du Cnis (Conseil national de l’information statistique) "Niveaux de vie et inégalités sociales" de 2007.

L’Onpes précise cette définition :

Le taux de pauvreté au seuil de 60 % (respectivement 50 %) du revenu médian est mesuré par la proportion d’individus vivant dans un ménage ordinaire dont le revenu, net d’impôts directs, par unité de consommation est inférieur à un montant équivalent à 60 % (respectivement 50 %) du niveau de vie médian de la population. Le seuil de pauvreté est calculé par rapport à la médiane de la distribution des niveaux de vie (la moitié de la population dispose d’un niveau de vie supérieur à la médiane, l’autre moitié a un niveau inférieur à la médiane).

C’est pourquoi l’Onpes utilise un tableau de bord composé d’une vingtaine d’indicateurs en plus des indicateurs de pauvreté monétaire qui déterminent les personnes dont les niveaux de vie sont inférieurs à un montant donné dit seuil de pauvreté (60 % du revenu médian, référence européenne, et 50 % du revenu médian ancienne référence française).

 Limites de l’approche monétaire

L’approche monétaire présente des limites puisqu’elle ne peut pas rendre compte de la pauvreté au moment donné : si le revenu médian augmente plus vite que le revenu des pauvres, alors la pauvreté augmente. De plus, elle ne peut pas rendre compte de la situation des plus pauvres parmi les pauvres ; elle reste donc très limitée.

Comme il n’existe pas de catégories officielles permettant de distinguer les "moins pauvres" des "plus pauvres", le Centre de recherche pour l’étude et l’observation sur les conditions de vie (CREDOC) qualifie de "ménages pauvres" ceux du premier décile et de "ménages modestes" ceux des deuxième et troisième déciles. Il s’agit d’une mesure statistique restreinte au niveau de revenus des ménages.

Définition d’un décile

Quand on découpe la population nationale en tranches égales de 10 %, on obtient ce que l’on appelle des déciles. Si on la découpe en fonction du niveau de salaire, un décile est le niveau de salaire qui sépare chaque tranche, de 10 % en 10 %.

Ensuite, les déciles sont classés par ordre croissant. Le premier décile représente donc le niveau de salaire pour lequel 10 % de la population touche moins que ce niveau de salaire (90 % touche plus). Le deuxième décile représente le niveau de salaire pour lequel 20 % touchent moins que ce niveau (80 % touchent plus).
Graphique : niveaux de salaires par sexe et par décile (PDF - 51.5 ko)

On peut donc se demander si l’approche monétaire est pertinente pour calculer la pauvreté. La tendance générale est de dire qu’elle est insuffisante et qu’il faut prendre en compte d’autres indicateurs comme les conditions de vie, l’accès aux droits, à la santé, au logement ou à la culture.

Dans son rapport 2007-2008 [3], l’Onpes rappelait déjà que la pauvreté est :

o conventionnelle puisqu’elle repose sur la définition de seuils et d’échelles d’équivalences décidés au niveau national et international ;

o un phénomène relatif puisqu’elle est définie par rapport à des « modes de vie acceptables », eux mêmes variables dans l’espace et dans le temps ;

o c’est un phénomène multidimensionnel qui ne saurait se réduire à l’absence ou à la privation de ressources monétaires.

Notes

[1Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, Les Travaux de l’Observatoire 2000, Chapitre 1, page 25

[2Joseph Wresinski, Rapport Grande pauvreté et précarité économique et sociale, Journal officiel de la République française, séances des 10 et 11 février 1987 du Conseil économique et social

[3« Mesures et évolution de la pauvreté », Rapport 2007-2008, Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale