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Rapport de Christophe Sirugue sur la simplification des minimas sociaux

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[20 avril 2016] PNG - 127 koSaisi par le Premier ministre en octobre 2015 d’une mission de réflexion sur les minimas sociaux, Christophe Sirugue, député de Saône-et-Loire, lui a remis, le 18 avril 2016, un rapport qui soumet différentes propositions de réforme : "Repenser les minimas sociaux : vers une couverture socle commune".

Pour l’élaboration de son rapport, le député s’était entouré d’un groupe de travail, dans lequel Étienne Pinte représentait le CNLE et qui a auditionné, entre autres experts de ces questions, des membres du 8e collège du CNLE.

Christophe Sirugue analyse dans son rapport les difficultés d’articulation entre les minimas sociaux en place actuellement, difficultés qui aboutissent à des échecs en matière d’accès aux droits. Il propose de repenser complétement les dispositifs et de tendre vers une "couverture socle commune".

Le rapport remis au gouvernement explore trois scénarios ambitieux de réforme des minimas sociaux qui bousculent largement les dispositifs en place.

Dix dispositifs dont l’articulation est souvent peu claire pour les usagers

Les minimas sociaux s’organisent actuellement en dix dispositifs différents, gérés par de multiples acteurs, et dont les conditions d’octroi sont souvent très compliquées à comprendre pour les personnes qui en sont destinataires :

  • Revenu de solidarité active (RSA)
  • Allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA)
  • Allocation de solidarité spécifique (ASS)
  • Prime transitoire de solidarité (PTS)
  • Allocation temporaire d’attente (ATA)
  • Allocation veuvage
  • Revenu de solidarité outre-mer (RSO)
  • Allocation demandeurs d’asile (ADA)
  • Allocation adulte handicapé (AAH)
  • Allocation supplémentaire d’invalidité (ASI)

Ainsi, si plus de quatre millions de personnes bénéficient des minimas sociaux en France, la multiplicité des dispositifs et les parcours complexes pour faire valoir ses droits favorisent des taux élevés de non-recours.

Trois scénarios pour une vraie simplification des minimas sociaux

Le député Christophe Sirugue propose trois scénarios pour refondre les minimas sociaux qui reposent sur une ambition commune : "Créer des dispositifs lisibles, ouverts à tous, sans condition d’âge et centrés sur l’allocataire."

Ces scénarios se basent sur sept principes fondamentaux :

  • rendre plus aisé le parcours de l’allocataire et donner au système une lisibilité accrue ;
  • réduire le non-recours aux minimas sociaux ;
  • lutter efficacement contre la pauvreté et préserver la situation des allocataires actuels ;
  • garantir l’équité entre les bénéficiaires de minimas sociaux ;
  • assurer le caractère opérationnel des mesures préconisées ;
  • garantir des mesures soutenables financièrement ;
  • assurer l’accès des jeunes aux dispositifs de droit commun.

Le premier scénario proposé vise à implémenter rapidement douze mesures de simplification des minimas sociaux actuels, ce qui permettrait de réduire leur complexité et ainsi de faciliter l’accès au droit des usagers :
  • développer les outils numériques afin de mieux informer les bénéficiaires potentiels et réduire les démarches à effectuer ;
  • favoriser les échanges de données entre opérateurs et réduire drastiquement, voire supprimer le nombre de pièces justificatives demandées ;
  • rendre plus prévisibles les montants versés aux allocataires du RSA en mettant en place le principe d’un « effet figé » sur trois mois ;
  • s’assurer que l’OFII soit en mesure de verser correctement aux demandeurs d’asile l’allocation à laquelle ils ont droit, dans un contexte de forte hausse de la demande d’asile ;
  • aligner le dispositif d’intéressement de l’ASS sur celui actuellement en vigueur pour le RSA ;
  • réaffirmer le caractère différentiel de l’AAH en mettant fin à la possibilité de cumul de l’AAH avec l’ASS ;
  • ouvrir la possibilité d’attribuer à titre définitif l’AAH 1 aux personnes en situation de handicap dont la situation n’est pas susceptible d’évoluer favorablement ;
  • s’assurer d’une explication plus simple des démarches liées à l’attribution de l’AAH, notamment à l’aide des outils « faciles à lire et à comprendre » (FALC) ;
  • étudier les possibilités d’extension de "l’effet figé trois mois" pour les personnes travaillant en milieu ordinaire ou protégé ;
  • permettre aux bénéficiaires de l’AAH1 de continuer à percevoir l’AAH, sans avoir à solliciter l’ASPA, lorsqu’ils atteignent l’âge de départ à la retraite ;
  • préparer un guide d’attribution pour remédier aux disparités d’attribution de l’AAH par les MDPH ;
  • accroître le rôle de l’État dans la procédure d’attribution de l’allocation, en particulier au sein des équipes pluridisciplinaires.

Le second scénario propose de regrouper les dix minimas sociaux en cinq pôles cohérents. Ce scénario permet un simplification importante de l’architecture des minimas sociaux et une réduction des interlocuteurs pour les allocataires.

- Trois pôles de synthèse :

La fusion du RSA avec l’allocation veuvage, l’allocation temporaire d’attente et le revenu de solidarité outre-mer permet de conforter un socle "solidarité" unique pour les personnes en difficulté. L’allocation spécifique de solidarité, avec une durée limitée à deux ans, reprendrait son rôle de transition entre le chômage indemnisé et l’emploi en créant un pôle "Fin de droits au chômage". Enfin, le rapprochement entre l’allocation supplémentaire d’invalidité et l’allocation adulte handicapé permettrait la création d’un pôle "Handicap et invalidité".

- Deux pôles inchangés : l’allocation demandeur d’asile (ADA) ainsi que les allocations vieillesse (ASPA et PTS).


Le troisième scénario, le plus innovant, promeut la création d’une "Couverture socle commune" qui viendrait remplacer tous les minimas sociaux.

Ce dispositif aurait pour objectif premier de lutter contre la pauvreté et non de doter tout un chacun d’un "revenu universel". Tout individu en difficulté percevrait, dès 18 ans, une allocation de base, qui serait donc uniquement attribuée sous condition de ressources. Son montant serait fixe (environ 400 € par mois) et pris en charge par l’État. Son attribution devrait à terme se faire automatiquement.

Deux compléments viendraient compléter la couverture socle commune :

  • Un complément d’insertion (environ 100 € par mois) à destination des actifs entre 18 et 65 ans serait versé aux personnes inscrites dans une démarche de "droits et devoirs". Ce complément serait financé par les départements.
  • Un complément de soutien bénéficierait aux personnes qui se trouvent dans des situation d’invalidité ou de handicap ainsi qu’aux plus de 65 ans. Il serait financé par l’État.

Le député Sirugue précise dans son rapport que les trois scénarios proposés sont indépendants, mais que, si le scénario 1 doit être mis en place rapidement, il faut faire un choix entre le scénario 2 et le scénario 3. Ce choix constituerait le point final de la réforme des minimas sociaux. Il considère toutefois que, du point de vue des objectifs fixés par la lettre de mission du Premier ministre, le scénario 3 est celui qui doit être privilégié car il permet d’atteindre tous les objectifs attendus de la réforme.

Une revalorisation des politiques d’insertion et d’accompagnement

Au-delà de la refonte des minimas sociaux, Christophe Sirugue plaide dans son rapport pour une revalorisation des budgets des politiques locales d’insertion et d’accompagnement car ceux-ci, aujourd’hui, ne représentent plus que 9 % du montant des dépenses des allocations financées par les départements (contre 12,6 % en 2004). Il demande donc que le nouveau schéma de financement du RSA, qui est en discussion, préserve et renforce les politiques d’insertion.

Le rapport promeut une recentralisation partielle du RSA, dont la part prise en charge par l’État pourrait atteindre 80 %, mais il demande en échange la restauration d’une obligation de financement en matière d’insertion par les départements. Il propose d’évaluer les politiques d’insertion conduites, grâce à un indicateur de résultat fondé sur le taux de sorties du RSA, et invite à mettre en place de véritables voies de recours pour permettre aux bénéficiaires du RSA de faire valoir leurs droits à l’accompagnement.

Christophe Sirugue sera auditionné sur les propositions de son rapport dans le cadre de la réunion plénière du CNLE du 19 mai 2016.





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